Son aire française s’étend des Pyrénées-Orientales en passant par la montagne Noire, les Cévennes et le couloir rhodanien jusqu’au-delà de Tournon-sur-Rhône. Le statut conservatoire de Reseda jacquinii au niveau national est assez obscur. Il s’agit d’une espèce protégée dans l’ancienne région Rhône-Alpes, bien que considérée comme LC dans la liste rouge régionale. Elle présente ses effectifs les plus importants dans le département de l’Ardèche et des populations moins nombreuses et plus éparses dans le Gard, la Lozère, l’Hérault et les Pyrénées-Orientales. Elle est d’ailleurs uniquement inscrite sur la liste rouge de Midi-Pyrénées avec un statut VU, alors que sa présence est marginale dans cette région. La biologie de la plante est mal connue et rend dès lors toute stratégie conservatoire délicate. Il s’agit d’une espèce observée à la fois dans des habitats naturels, rochers siliceux chauds, landes acidiphiles, et artificiels, carrières, bermes routières, voire champs cultivés etc.
Dans le cadre de la stratégie ERC, des mesures compensatoires de réensemencement par graines ont pu être proposées dans plusieurs sites du Sud-Est de la France. Or, les expériences de germination in-situ et ex-situ réalisées par nos soins depuis 2013 ont permis de mettre en évidence une inhibition tégumentaire forte, difficile à lever notamment dans la nature. Bien que généralement considérée comme une espèce annuelle, Reseda jacquinii est en fait pérenne. Nous avons étudié la multiplication de cette espèce au moyen de culture sous serre et sur le terrain. Nous avons pu montrer que la propagation de Reseda jacquinii repose essentiellement sur la multiplication végétative, par le biais de fragments racinaires tubérisés. Cette capacité de multiplication végétative à partir de fragments, et la probable régénération des souches installées profondément, permet de rendre compte des variations des individus d’une année sur l’autre, notamment en cas de perturbations mécaniques ou d’aléas climatiques (sécheresse entraînant une mortalité importante d’une année à l’autre).
Le suivi de plusieurs populations ardéchoises a permis de mettre en évidence une certaine sensibilité de ces dernières vis-à-vis de conditions environnementales, en particulier les contraintes hydriques. Les sécheresses répétées ont pour conséquence une forte mortalité, à la fois des individus adultes dans les habitats naturels, des intermédiaires dans les habitats artificiels et des juvéniles (issus de germination ou de fragments de racines). Ces observations sont parfaitement en accord avec le caractère quelque peu erratique des observations de populations d’une année sur l’autre. D’autre part, les populations de Reseda jacquinii montrent probablement une certaine vulnérabilité face aux effets d’une hausse des températures et de la modification du régime des précipitations. Il est vraisemblable, au vu de nos observations, que le changement global entraîne des effets délétères sur les populations de cette espèce, à la fois par une mortalité accrue des adultes et par une baisse du taux de reproduction.